par Jessie Penn-Lewis
Le cœur brisé
de JĂ©sus au Calvaire.
« Mon cœur
est comme de la cire, il se fond dans mes entrailles ». Tel est le langage de Jésus-Christ sur la Croix ;
selon que prophétise David, en ce psaume vingt-deuxième ; Cela fait penser aux
soupirs, aux paroles entrecoupées, inachevées, d’un mourant.
Dans le chemin de
l’âme amenée à la conformité avec son Sauveur, en sa mort, il vient un moment
où elle comprend ce que signifie la communion avec ce cœur brisé qui fond comme
la cire, sous l’attouchement de Dieu.
Alors, elle acquiert cette tendresse, cette douceur, cette compassion qui
caractérisent ceux qui vivent en Jésus.
« Revêtez-vous
comme des élus de Dieu, saints et bien aimés, d’entrailles de
miséricorde », écrit l’apôtre
aux Colossiens. Dans toutes ses lettres, dans sa vie, il fait preuve de
compassion, de miséricorde, pour ceux qu’il a amenés à Christ, lesquels restent
cependant souvent si enfants, si charnels. « Moi je suis de Paul ! Et moi d’Apollos ! Et moi de Céphas ! Et moi de
Christ ! » disent les Corinthiens. Et l’apôtre proteste : Christ est-il
divisé ? Paul a-t-il été crucifié pour vous ? (Cor. 1 : 12-13).
Cependant Il ne se sépare pas de ces bébés, spirituellement parIant. » Auriez-vous dix mille maîtres en Christ, vous
n’avez pas plusieurs pères, puisque c’est moi qui vous ai engendrés en
Jésus-Christ par l’Evangile » (1 Cor. 4 : 15). Pourquoi ces
divisions ? Pourquoi s’enfler d’orgueil ? L’apôtre met en garde les nouveaux
convertis contre ce danger ; puis il trace comme un parallèle entre eux et leur
père spirituel. Les Corinthiens, eux, se croient sages en Christ, ils règnent
déjà . Paul et ApoIIos sont fous, par amour pour Christ. Les Corinthiens sont
forts ; mais ceux que Dieu a choisis pour annoncer l’Evangile et qui ont Ă
supporter de grandes souffrances, sont faibles. Les Corinthiens sont honorés ;
mais les apôtres sont méprisés.
Quelle distance entre
ces bébés qui se croient forts, et l’apôtre Paul ! Comme dans l’Eglise de
Corinthe, autrefois, on trouve encore aujourd’hui bien des maîtres. Mais les
pères, ceux qui acceptent de souffrir, de porter les bébés en Christ dans leur
cœur, jusqu’à ce que leur croissance spirituelle soit accomplie, ceux-là sont
peu nombreux.
Un cœur de père plein
de compassion, de tendre pitié, d’ardent désir pour la croissance et la vie
d’autres âmes, cela ne peut être que le fruit de la Vie divine dans le racheté.
Cette Vie-là rend capable de souffrir, d’endurer l’incompréhension et le
mépris, par amour pour Jésus. Quelques Chrétiens s’imaginent que la communion
aux souffrances du Christ, en sa mort, endurcit nécessairement le cœur, et rend
moins vulnérable aux émotions. D’autres s’élèvent contre cette conception. Ils
ne croient pas possible d’éliminer l’émotion des expériences spirituelles. La
vie même du Seigneur Jésus, et les lettres de l’apôtre Paul, nous montrent ce
que sont vraiment les résultats de la vie crucifiée.
Il est
certain que la communion avec Christ en Sa mort délivre d’une émotivité
exagérée, d’une sensibilité maladive, laquelle peut être une manifestation de
la vieille nature. Ainsi
libérée, l’âme devient toujours plus sensible, réceptive, pour tout ce qui
concerne Christ et le prochain. Il
est nécessaire que toute émotion superficielle disparaisse pour que la Vie
divine puisse atteindre les profondeurs de l’être, pour que
celui-ci soit accessible, réceptif. Ensuite, rempli de la Vie d’En-Haut, il
peut la répandre en faveur des autres.
« Revêtez-vous
d’entrailles de miséricorde », dit l’apôtre aux Colossiens (3 : 2).
Expression bien suggestive qui évoque la profondeur, la réalité, la puissance
du sacrifice ; ce qui ne peut résulter d’émotions de surface, ces émotions
facilement ressenties en certaines réunions où l’orateur les éveille, sciemment
ou non. D’autre part, de nombreux
maîtres peuvent enseigner, communiquer la lumière et la connaissance, sans
avoir ces entrailles de miséricorde, sans ce cœur rempli de compassion que
recommande l’apôtre. Bref, c’est le cœur qui est nécessaire,
c’est la capacité de sentir et de se sacrifier pour les autres qu’il faut. Et c’est le manque de cœur, le manque d’amour qui
rend froide et indigeste la Vérité, lorsqu’elle est rejetée.
« Mes
entrailles ! mes entrailles ! »
s’écrie le prophète Jérémie. « Je
souffre au dedans de mon cœur, le cœur me bat. Je ne puis me taire »
(4 : 19). C’est à cause d’Israël que le prophète est envahi par la douleur. Et
c’est à cause de cette capacité de souffrance pour son peuple qu’on a comparé
Jérémie à Celui qui vint ici-bas, comme l’Homme de Douleur, brisé par la
souffrance.
Son immense
compassion pour l’humanité amène Dieu à envoyer ici-bas son Fils unique : « Béni soit le Seigneur, le Dieu d’Israël
de ce qu’il a visité et racheté son peuple… GRACE AUX ENTRAILLES DE LA
MISERICORDE DE NOTRE DIEU, en vertu de laquelle le Soleil levant nous a visités
d’en haut » (Cantique de Zacharie, Luc 1 : 68-80.) Ecrivant à Philémon,
l’apôtre dit au sujet d’Onésime : « Je
te le renvoie, lui, mes propres entrailles (c’est-à -dire un autre
moi-même) ». D’autres traductions rendent ainsi cette expression : « lui, mon propre cœur » (Philémon 1
: 12). Lire aussi Eph. 4 : 32 ; Phil. 2 : 1,2.
Tous ces
passages montrent que Dieu peut communiquer à Ses rachetés ces entrailles de
miséricorde, ce cœur compatissant, qui L’amenèrent Lui-même à envoyer Son Fils
ici-bas. Compassion qui conduisit le Fils unique Ă mourir sur la Croix pour les
pécheurs.
« Soyez
compatissants, vous pardonnant… comme Dieu vous a pardonné », dit l’apôtre Paul. Celui qui a senti son cœur
s’émouvoir, se fondre sous les effets de la compassion divine, celui qui en a
éprouvé la douceur et la joie, peut aisément aimer, pardonner à celui qui a
tort, avant même que celui-ci ait manifesté aucune tristesse, aucun repentir de
la faute commise. Et, d’avoir fait ces expériences rend capable d’annoncer le
pardon de Dieu aux âmes qui se repentent. Un cœur compatissant, des entrailles
de miséricorde se réjouissent de la joie des autres.
Et quelles paroles
exquises, quel tact dans l’expression ils savent trouver pour plaider en faveur
des coupables. Lisez la lettre de Paul à Philémon : « Je te prie pour mon enfant, que j’ai engendré étant dans les
chaînes, Onésime… » (1 : 10-12). Avec quelle tendresse
l’apôtre parle de cet esclave fugitif phrygien ! II l’a amené à Christ, il a
prié pour lui jusqu’à ce que Christ fût formé en lui. Aussi maintenant, Onésime
est pour lui un fils.
Dans les diverses
Eglises qu’il a fondĂ©es au sein du paganisme, pour ceux qu’il a amenĂ©s Ă
Christ, mĂŞme en prison, nous voyons de quelle patience, de quelle compassion,
de quelle tendresse l’apôtre est animé. Il a vraiment pour eux des entrailles
de miséricorde. « Ce ne sont pas vos
biens que je cherche, c’est vous-mêmes », écrit-il aux
Corinthiens. « Pour moi, je
dépenserai très volontiers, et je me dépenserai moi-même pour vos âmes,
dussé-je, en vous aimant davantage, être moins aimé de vous… »
(2 Cor. 2 : 14-15). « Maintenant
nous vivons, puisque vous demeurez fermes dans le Seigneur ».
Une autre traduction dit : « La vie
est vraiment pour nous la vie, puisque vous demeurez fermes dans le
Seigneur » (1 Thess. 3 : 8). L’apôtre pense sans cesse à tous
ceux qu’il a amenés à Christ. Il prie sans cesse pour eux, comme un père pour
ses enfants.
Dix mille
maîtres ! Oui. Mais les pères
ne sont pas nombreux. Ils sont peu nombreux ceux qui consentent Ă la souffrance
pour les autres, Ă porter dans leur cĹ“ur le fardeau de leurs besoins, Ă
éprouver de l’angoisse pour leurs âmes, à verser des larmes.
Dirons-nous que le
langage de l’apôtre était exagéré ? Certes non ! Car dans la communion avec
Dieu et avec son Fils JĂ©sus-Christ, il
a entendu le grand soupir de la Création ; en son cœur, il a
ressenti l’immense douleur, l’angoisse des âmes sans Dieu dans le monde, sans
Sauveur. Pour elles, son cœur est rempli de compassion, de tendresse.
Pouvons-nous, comme l’apôtre, avoir un cœur rempli de compassion active,
effective ? Assurément. « Revêtez-vous,
dit-il, comme des élus de Dieu, saints et bien-aimés, d’entrailles de
miséricorde, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience »
(Colossiens 3 : 1-2). Il vient de les exhorter à se dépouiller du vieil homme et de ses œuvres, et à revêtir l’homme
nouveau, qui se renouvelle dans la connaissance, selon l’image de celui qui l’a
créé (versets 10-11). Ah ! Voilà le secret : le vieil homme a été
crucifié ! La Croix du Calvaire est l’endroit de la bénédiction. Là tombent
toute étroitesse, toutes ces barrières dressées par ce qui est terrestre. Là est dépouillée cette vie égoïste qui cherche la
satisfaction du moi, qui ramène tout à soi. Ensuite, l’homme
nouveau (ou la nouvelle nature) est revêtu, qui se renouvelle selon l’image de
Celui qui l’a créé. Là , plus de distinctions terrestres, plus de divisions, de
séparations, Christ est tout en tous. C’est seulement dans le Christ Jésus que
nous pouvons recevoir ces entrailles de miséricorde, entrer dans la communion
de Ses souffrances, et connaître cette ferveur d’amour, cette tendresse, qui
sont d’essence divine.
Il est question du
renouvellement du nouvel homme. Un processus de croissance suit effectivement
le dépouillement de la vieille nature. Toute colère, toute animosité, toute
malice, toute moquerie, toute parole déshonnête doivent être rejetées. Et, dans
ce renouvellement progressif de l’homme nouveau, l’heure sonne de la communion
aux souffrances de Christ pour le salut des perdus. Alors l’être intérieur tout
entier, animé des compassions de Dieu, sera peut-être amené à plaider pour une
nation comme Jérémie ; ou bien à travailler à la formation de Christ dans les
âmes comme l’apôtre Paul ; ou encore à manifester l’amour de Dieu envers les
autres ; à être bon, compatissant, à pardonner comme Dieu nous a pardonnés en
Christ (Eph. 4 : 32). Il ne pourra pas fermer ses entrailles au frère dans le
besoin (1 Jean 3 : 17) ; il ne pourra pas non plus négliger de prier pour les
autres avec la tendresse de JĂ©sus-Christ (Phil. 1 : 8). Enfin, il est prĂŞt Ă
donner sa vie aux frères, à exercer la miséricorde envers tous ; bien qu’aimant
davantage, il soit moins aimé.
Comment cela se
peut-il faire ? Par la foi. « Celui
qui croit en moi, dit Jésus… » II y a là une foi qui unit
celui qui croit à son Sauveur. C’est
plus qu’un acquiescement mental, plus que le fait de croire Ă
une autre personne. « Quand j’aurai
été élevé de la terre, dit Jésus, j’attirerai tous les hommes à moi »
(Jean 12 : 32-33).
Ainsi le Seigneur sur
la croix attire le racheté qui croit en Lui ; et le sauvé est uni au Sauveur,
en sa mort. Il est planté avec Lui en Sa mort (Romains 5 : 5), ou bien encore
greffé en Lui au Calvaire, afin d’être fait participant de Sa Vie. Une seule
vie désormais pour la greffe et la plante où elle a été insérée. La greffe est
solidement maintenue par des liens. Ici, les liens de la foi et du don total de
soi-mĂŞme.
DEPOUILLE ! REVETU !
UNI AU CHRIST, EN SA MORT ! DESORMAIS UNE MEME PLAlNTE AVEC LUI ! FAIT
PARTICIPANT DE SA VIE, LA VIE DIVINE ! Telles sont les Ă©tapes par lesquelles le
Saint-Esprit conduit le racheté. Dès lors, des fleuves d’eau vive coulent de
celui-ci ; en réalité de Jésus. Car le racheté est une même plante avec son
Sauveur, CELUI QUI EST LA VIE.
Uni au cœur brisé du
Sauveur en faveur d’un monde perdu, le racheté est constamment livré à la mort
pour l’amour de Jésus, afin que la vie de Jésus puisse être manifestée dans sa
chair mortelle. « La mort agit en
nous, mais la vie en vous », dit l’apôtre. La vie du Christ en abondance,
en faveur des autres.
« C’est
du cœur que procèdent les sources de la vie », écrit Salomon. Et ceci est magnifiquement
illustré par l’Amour dont nous sommes aimés, et comme enveloppés. « Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné son Fils Unique, afin que
quiconque croit en lui ait la vie éternelle » (Jean 3 : 16).
Source :
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