Qu'est-ce que le réveil ?
C'est simplement la vie du Seigneur Jésus répandue dans le coeur des hommes.
Christ est toujours vainqueur. Au ciel, retentissent continuellement des
accents de louange pour sa victoire. Quelles que soient nos défaites et notre
stérilité, lui n'est jamais vaincu. Sa puissance est illimitée. Tout ce que
nous avons à faire, de notre côté, c'est de mettre au point nos relations avec
lui, afin de démontrer sa puissance dans notre coeur, notre vie, notre service
; ainsi, sa vie victorieuse nous remplira et débordera sur les autres. Voilà le
réveil dans son essence.
Cependant, si nous voulons connaître
ces justes rapports avec lui, il faut tout d'abord que notre volonté propre
soit brisée et soumise à la sienne. Le brisement, c'est le commencement du
réveil. C'est un chemin douloureux, humiliant, mais c'est le seul chemin. « Non
plus moi, mais Christ »
« J'ai été crucifié avec Christ; et si je
vis, ce n'est plus moi qui vis, c'est Christ qui vit en moi; si je vis
maintenant dans la chair, je vis dans la foi au Fils de Dieu, qui m'a aimé et
qui s'est livré lui-même pour moi » Galates 2:20.
Le Seigneur Jésus ne saurait vivre en nous pleinement, ni se
révéler par nous, tant que notre «moi» orgueilleux n'est pas brisé. Cela
signifie simplement que ce moi, dur et intraitable, qui se justifie, défend ses
droits et cherche sa propre gloire, se soumette enfin à la volonté de Dieu,
admette ses fautes, abandonne sa volonté propre et ses droits, et renonce à sa
propre gloire, afin que Jésus le possède et soit tout en lui. En d'autres
termes, être brisé, c'est mourir à soi-même sous tous les rapports.
Si nous considérons honnêtement notre
vie chrétienne, nous verrons combien ce moi occupe de place en nous. C'est si
souvent lui qui s'efforce de vivre cette vie chrétienne (le terme même de
«s'efforcer» indique que le moi est à la base de cet effort). C'est bien
souvent le moi qui veut servir Christ. Et c'est toujours lui qui s'irrite,
éprouve de l'envie, de la rancune, critique et s'inquiète ; c'est encore lui
qui est dur et intolérant à l'égard des autres, timide, satisfait de lui-même,
renfermé... Oui, vraiment, nous avons besoin d'être brisés. Dieu ne peut guère
agir en nous tant que le moi occupe le poste de
commandement, car tous les fruits de l'Esprit énumérés dans l'épître aux
Galates (chapitre 5) et dont Dieu désire nous remplir, sont l'opposé de
l'esprit dur et insoumis qui habite en nous, et ne peuvent se manifester que si
ce dernier est crucifié.
Le brisement est à la fois l'oeuvre de Dieu et la
nôtre. En effet, Dieu exerce comme une pression sur nous, mais c'est à nous de
l'accepter ou de la refouler. Si, dans notre recherche de communion avec Dieu,
nous sommes vraiment prêts à nous laisser convaincre par sa lumière, il
démasquera en nous le moi dur et orgueilleux qui le fait tant souffrir. Nous
pourrons alors, soit raidir le cou et refuser de nous repentir, soit nous
courber et dire : «Oui, Seigneur» Le
brisement quotidien, c'est simplement accepter dans l'humilité tout
ce dont Dieu veut nous convaincre. Cela peut nous coûter cher, si nous
considérons tous les droits et intérêts égoïstes que nous devons abandonner, et
les confessions et les restitutions éventuelles à faire.
Seule la Croix peut produire en nous ce
brisement.
Jésus a accepté d'être brisé pour nous
; il n'y a donc plus de raison pour que nous ne le soyons pas à notre tour.
Jésus est celui qui, existant en forme de Dieu, n'a point regardé comme une
proie à arracher d'être égal avec Dieu, mais s'est dépouillé lui-même, prenant
la forme d'un serviteur -serviteur de Dieu et des hommes. Nous le voyons
renonçant volontairement à ses droits, à la possession d'un foyer ou de n'importe
quel bien, prêt à se laisser injurier sans répondre, à se laisser piétiner sans
se défendre. Mais, par-dessus tout, nous le voyons brisé, tandis qu'il gravit
humblement le Calvaire, pour y devenir notre bouc émissaire, en portant nos
péchés en son corps sur le bois. « Je suis un ver et non un homme », dit-il
dans un psaume prophétique (Psaume 22 : 6). Ceux qui ont habité les pays
tropicaux savent toute la différence qui existe entre un serpent et un ver.
Attaqué, le serpent se redresse, siffle et contre-attaque, essayant de rendre
les coups qu'on lui porte -c'est l'image du moi. Mais un ver n'offre aucune
résistance ; on peut faire de lui ce qu'on veut, le repousser du pied ou
l'écraser : il ne riposte pas -c'est l'image du vrai brisement. Jésus a accepté
de devenir cela pour nous : un ver et non un homme. Il l'a fait, sachant que le
péché nous avait fait perdre tous nos droits, et mériter l'enfer. Et,
maintenant, il nous invite à prendre notre place véritable, à devenir des vers
pour lui et avec lui. Tout le sermon sur la montagne, avec ses préceptes de non
vengeance, d'amour pour nos ennemis et de charité désintéressée, nous enseigne
que c'est là notre position véritable. Seule la vision de l'Amour qui a accepté
d'être brisé à notre place peut nous conduire jusque-là :
Viens, O Seigneur, et brise-moi,
Que je me courbe et meure
Comme toi, lorsque, Ã Golgotha,
Tu baissas la tête pour moi.
Cependant, on ne meurt pas à soi-même
une fois pour toutes. Le brisement initial
est constamment suivi de nouveaux brisements, car c'est seulement ainsi que le
Seigneur Jésus peut se révéler constamment à travers nous :
« …portant toujours avec nous dans notre
corps la mort de Jésus, afin que la vie de Jésus soit aussi manifestée dans
notre corps » 2
Corinthiens 4:10.
Tout au long de la journée, le choix se présentera à nous de mille
manières. Cela signifiera le renoncement à nos projets, à nos plaisirs et à la
libre disposition de notre temps et de notre argent. Nous rechercherons alors
constamment le bien de ceux qui nous entourent, car ce que nous donnons à nos
frères est le sûr critère de ce que nous donnons à Dieu. Chaque humiliation,
chaque vexation que nous sommes appelés à endurer est un moyen dont Dieu se
sert pour nous briser, afin de creuser plus profondément le canal par lequel
s'écoule la vie de Christ.
De fait, la seule vie susceptible de plaire à Dieu et de remporter
toujours la victoire, c'est Sa vie -jamais la nôtre, quels que soient nos
efforts. De même que notre vie centrée sur nous-mêmes est exactement à l'opposé
de celle de Christ, de même nous ne pourrons être remplis de la sienne qu'à la
seule condition d'accepter que Dieu fasse constamment mourir la nôtre. C'est
ici qu'intervient notre choix.
Chapitre 1 du livre « Le Chemin du Calvaire » par Roy
Hessein