RĂ©flexions dâEthique ChrĂ©tienne sur
la PROPOSITION DE LOI
visant Ă limiter la possibilitĂ© dâinstruction
obligatoire donnĂ©e par la famille Ă domicile aux seuls cas dâincapacitĂ©.
Texte de Jean lâAmandier
Une
menace de plus sur la liberté de transmettre
Il
est frappant de noter ce souffle, cette volonté de repenser la société, de lui
imposer de nouvelles rÚgles comme pour recadrer ce qui a fondé sa culture et
ses valeurs. Il est Ă©galement Ă©tonnant dâobserver cette pugnacitĂ©, cette
combativitĂ© Ă laquelle sâemploie les pouvoirs publics pour installer de
nouveaux codes éthiques, une morale, des valeurs républicaines.
En
moins dâune dĂ©cennie, nous assistons au dĂ©veloppement dâinterventions de lâĂ©tat
dans les dimensions de la libre conscience, au déploiement de lois liberticides
qui encadrent cette facultĂ© laissĂ©e Ă chacun de transmettre, dâĂ©duquer, de
partager ses croyances et valeurs auprĂšs de sa famille.
Dans
ce contexte sociĂ©tal et dâinterventions de lâĂ©tat, une fois de plus la
tentation de rogner sur les libertés individuelles, de soustraire les parents
dâun droit de regard sur la libre transmission de leurs valeurs, est engagĂ©e.
Lâinstruction
a Ă©tĂ© jusquâĂ ce jour laissĂ©e au libre choix des parents, (« Lâinstruction dans
la famille peut ĂȘtre un choix dĂ©libĂ©rĂ© des responsables de lâenfant. Elle sera
alors dispensĂ©e par les parents ou une personne de leur choix » comme lâindique
la législation qui encadre la scolarisation).
Or
cette possibilitĂ© dâinstruction confĂ©rĂ©e librement aux parents est de nature Ă
ĂȘtre remise en question. En effet il suffit de lire ou de relever ces coups de
boutoirs rĂ©pĂ©tĂ©s et assĂ©nĂ©es par les idĂ©ologies en cours. Ces idĂ©ologies visent Ă dĂ©construire lâhomme tel quâil est.
Ces nouvelles croyances ambitionnent de refonder lâhomme sur les bases dâune
religion républicaine. « On ne peut pas faire une révolution uniquement dans la
matiÚre, il faut la faire dans les esprits, or on a fait la révolution
essentiellement politique, mais pas la révolution morale et spirituelle. Et
donc on a laissĂ© la morale et le spirituel Ă lâĂ©glise catholique. Donc il faut
remplacer ça⊠» Vincent Peillon Ministre de lâĂ©ducation nationale. Le mĂȘme
ministre parlait de religion rĂ©publicaine Ă mettre en Ćuvre et de lâinstaller
ainsi dans les esprits.
Pour
vivre en société, nous comprenons tous, quels que soient les milieux
confessionnels, lâaspiration au respect de lâautre et du prochain. Les parents
dans leur ensemble sont ainsi largement favorables Ă une Ă©ducation Ă la
citoyennetĂ© et au vivre ensemble, mais comme lâindique ValĂ©rie Marty,
prĂ©sidente de la FĂ©dĂ©ration des Parents dâĂ©lĂšves de lâenseignement public il ne
faut pas aller au-delà « sinon ce sera le conflit ouvert entre lâĂ©cole et les
parents dâĂ©lĂšves, sans compter la position inconfortable qui sera rĂ©servĂ©e aux enseignants
».
Nous
voulons ici rappeler que la libertĂ© dâinstruction est confĂ©rĂ©e aux Parents,
elle est inscrite dans la Convention des droits de lâenfant, elle figure en
lieu et place dans la Convention europĂ©enne des droits de lâhomme.
La
France comprend plusieurs milliers dâenfants dont lâinstruction se fait hors du
cadre scolaire. Les raisons qui légitiment les choix des parents à choisir une
instruction hors du cadre scolaire sont plurielles soit par défaut ou motivé.
Les mobiles peuvent résulter ou relever de difficultés de leur(s) enfant(s), du handicap, de la
maladie, de contraintes ou de la volonté raisonnée et réfléchie de la part de
parents considĂ©rant que les programmes de lâĂ©ducation nationale ne sont pas,
peu ou prou adaptés à leurs enfants.
Or
dans lâhĂ©micycle de lâassemblĂ©e nationale ou en dehors de cette enceinte, des
ministres comme Madame Taubira et Vincent Peillon avaient indiquĂ© dĂšs 2013 : « quâil faut ĂȘtre capable dâarracher lâĂ©lĂšve Ă tous les dĂ©terminismes, familial,
ethnique, social, intellectuel ».
Au
fond Ă lâexamen de ces mots plein de gravitĂ©, il y a comme une forme de
violence faite aux familles. Lâexpression « vouloir « arracher » leurs enfants
aux dĂ©terminismes, culturels et religieux », est lâannonce dâune idĂ©ologie qui
consacrera lâĂ©cole comme le lieu de rĂ©paration des inĂ©galitĂ©s sociales Ă
rebours des familles lieu de reproduction des inégalités sociales.
Nonobstant
de quel droit avons-nous Ă offenser les familles dans leurs convictions les
plus intimes ?
Alors
comment ne pas ĂȘtre surpris de voir une proposition de loi, (PROPOSITION DE LOI
Enregistrée à la Présidence du Sénat le 18 décembre 2013 proposant de modifier
certains alinĂ©as de Lâarticle L. 131 du code de lâĂ©ducation) visant Ă limiter
la possibilitĂ© dâinstruction obligatoire donnĂ©e par la famille Ă domicile aux
seuls cas dâincapacitĂ©, loi qui est prĂ©sentĂ©e par des Ă©lus de lâopposition qui
sâinscrivent de facto dans cette dimension de religion RĂ©publicaine et dont les
contours sont ici rappelés par les sénateurs auteurs de cette proposition de
Loi.
Préambule
de la proposition de loi « Lâun des buts de la scolarisation de lâenfant est sa
socialisation. Celle-ci nécessite une éducation qui ait une dimension
collective, qui lui permette de découvrir la diversité des conditions et des
cultures des enfants de son ùge et de rendre son développement plus harmonieux.
Dans
cet esprit, lâĂ©ducation Ă domicile par la famille ne peut ĂȘtre quâune situation
exceptionnelle, liĂ©e Ă lâĂ©tat de santĂ© ou Ă lâincapacitĂ© permanente ou
temporaire de lâenfant.
Elle
ne peut ĂȘtre le prĂ©texte dâune dĂ©socialisation volontaire, destinĂ©e Ă soumettre
lâenfant, particuliĂšrement vulnĂ©rable, Ă un conditionnement psychique,
idéologique ou religieux⊠»
Le
dernier paragraphe est une atteinte grave à la liberté de transmettre et qui
doit alerter la libre conscience de chacun notamment des parents qui
sâemploient et sâĂ©vertuent Ă construire des repĂšres auprĂšs de leurs enfants.
Nous sommes ainsi dubitatifs sur le souhait angélique de lutter contre les
inégalités de genre. La lutte contre les discriminations peut avoir pour effet
paradoxale dâattiser les rejets, les incomprĂ©hensions des familles. Chaque
Famille en libre conscience ne doit ĂȘtre nullement soumise Ă une forme de
diktat qui lui imposerait le LA dâune pensĂ©e idĂ©ologique imposĂ©e Ă ses enfants.
Comme
ValĂ©rie Marty, prĂ©sidente de la FĂ©dĂ©ration des Parents dâĂ©lĂšves de
lâenseignement public nous pouvons lĂ©gitimement partager la mĂȘme inquiĂ©tude : «
⊠je suis trĂšs inquiĂšte sur ce quâentend le ministre par lâenseignement de la
morale laĂŻque (âŠ) En arrachant lâenfant au dĂ©terminisme familial ou ethnique,
lâĂ©cole dĂ©ferait ce que construit la famille ? (âŠ)».
Ainsi
la proposition de loi portĂ©e par des Ă©lus de lâopposition (UMP) sâinscrit dans
une forme de mouvement sociĂ©tal, dâoffensive rĂ©formatrice qui peut avoir des
conséquences graves.
William
Godwin philosophe, thĂ©oricien politique et romancier britannique refusait dĂ©jĂ
dĂšs le 18Ăšme siĂšcle la perspective dâune Ă©ducation nationale, symbole selon lui
dâune domination inconsidĂ©rĂ©e façonnant les esprits dans le moule de
lâuniformitĂ©. William Godwin insistait ainsi sur la nĂ©cessitĂ© que lâĂ©cole soit
en dehors du systĂšme dâĂ©ducation nationale, « Ă cause de son rĂŽle aliĂ©nant sur
les individus et du conformisme de pensĂ©e quâil vĂ©hicule ».
Selon
nous lâĂ©ducation ou plutĂŽt la transmission des savoirs doit lâĂȘtre au nom du
bien commun. LâĂ©cole doit ĂȘtre un rĂ©vĂ©lateur de talents et dâaccompagnement des
talents et non un lieu de redressement de lâhĂ©ritage culturel transmis aux enfants
et les façonnant aux principes dâune nouvelle religion.
Dans
ce contexte lâĂ©cole ne saurait ĂȘtre un instrument de reproduction des
structures sociales et de culture idĂ©ologique, un systĂšme oĂč le rĂŽle social des
Ă©lĂšves leur serait assignĂ©, imposĂ©, pour se conformer Ă la pensĂ©e de lâEtat.
«
Instruis lâenfant selon la voie quâil doit suivre »
Nous
voyons nous ChrĂ©tiens le dĂ©fi qui est posĂ© aujourdâhui par les projets
Ă©ducatifs Ă rebours de la pensĂ©e Biblique « instruis lâenfant selon la voie
quâil doit suivre, et quand il sera vieux il ne sâen Ă©cartera pas. » Livre des Proverbes 22.6
Rappelons
aussi ces versets des écritures toujours dans le livre des Proverbes 4.1 «
Ecoutez, mes enfants, lâinstruction dâun pĂšre ? Soyez attentifs pour acquĂ©rir
du discernement. »
Lâinstruction
dans lâapproche biblique est une recommandation. Les Ă©critures convient,
invitent clairement les parents, les familles au devoir dâinstruire leurs
enfants. Les enfants ne sauraient ainsi croitre, grandir comme des personnes
sans tuteurs, les parents sont appelĂ©s Ă ĂȘtre des modĂšles auprĂšs de leurs
enfants et Ă ainsi bĂątir des repĂšres, ce rĂŽle nâest nullement confiĂ© Ă lâĂ©tat,
ce nâest pas sa vocation, mais câest Ă la famille quâil est dĂ©volu dâinstruire,
de transmettre. Or nous prenons conscience des risques de collusion, de
conflits entre les projets Ă©ducatifs des parents ChrĂ©tiens et lâĂ©tat qui a pour
projet de diffuser une idĂ©ologie sociĂ©tale fondĂ©e notamment sur lâĂ©galitĂ© de
genre.
LâĂ©tat
SuĂ©dois a dĂ©chargĂ© les parents de toute responsabilitĂ© Ă©ducative, il sâen suit
une situation de dĂ©rĂ©liction et de mal ĂȘtre.
Voulons
nous de cette sociĂ©tĂ© suĂ©doise telle que lâa dĂ©crit SĆur Veronica, une
dominicaine qui vit en SuÚde, exposant une société confrontée à une forme de
dĂ©rĂ©liction, dâangoisse morale et existentielle, je la cite « nous pouvons
constater à quel point il est difficile de se construire dans une société qui
se charge de faire votre bonheur ! Les jeunes et moins jeunes qui viennent ici
sont de plus en plus des personnes fragiles, gentilles, mais sans force,
fatiguées de vivre ! »
«
Sous les apparences de la réussite, le malaise est profond dans ce pays la
SuĂšde qui voudrait ĂȘtre un paradis. Le bonheur nâest pas au rendez-vous et la
rĂ©ussite extĂ©rieure ne fait que souligner le mal ĂȘtre intĂ©rieur. Sans doute
faut-il vivre ici pour le constater⊠»
Chacun
est seul et cela me frappe beaucoup dans les familles. FinanciĂšrement les
enfants ne sont pas Ă la charge de leurs parents. Les impĂŽts sont toujours
payĂ©s individuellement, quâon soit mariĂ© ou non. LâĂ©tat a dĂ©chargĂ© les parents
de toute responsabilitĂ© Ă©ducative. LâĂ©cole se charge dâĂ©duquer et dâenseigner
ce quâil faut penser. Les parents, souvent trĂšs gentils par ailleurs, ne savent
plus quâils ont une responsabilitĂ© Ă©ducative vis Ă vis de leurs enfants. Ils
respectent Ă tel point leur libertĂ© quâils les voient faire les pires choses
sans oser leur parler ou intervenir, et sans mĂȘme penser quâils pourraient ou
devraient le faire. Comme me le disaient un couple : Nous souffrons de ce que font
nos enfants, mais nous ne pouvons quâĂȘtre lĂ , continuer Ă les aimer et attendre
que les choses aillent mieux pour euxâŠ. »
» ⊠Nous essayons de les aider du mieux que
nous pouvons, mais nous nous sentons souvent trÚs démunis devant une souffrance
si profondeâŠ. »
Lâenjeu
Ă©ducatif ne saurait ĂȘtre le formatage des esprits mais le respect absolu de la
libre conscience et sa formation pour dĂ©couvrir les talentsâŠ
En
regard des enjeux sociĂ©taux tels que nous sommes amenĂ©s aujourdâhui Ă les vivre
aucune proposition de loi se devrait empĂȘcher le devoir de transmettre via la
cellule familiale, toute proposition devrait garantir la liberté des parents
dâadhĂ©rer ou non aux valeurs touchant la protection de leurs enfants. Lâenjeu
ne saurait ĂȘtre le formatage des esprits mais le respect de la libre conscience qui doit ĂȘtre inscrit
comme un principe absolu et indiscutable.
Il
nous semble fondamental pour conclure que « La famille, société naturelle,
existe antĂ©rieurement Ă lâĂtat ou Ă toute autre collectivitĂ© et possĂšde des
droits propres qui sont inaliénables ».
Eric
Lemaitre
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