Par Watchman Nee
Note du Sarment : Une vision de la vie chrétienne qui a
graduellement été remplacée justement par ce qui est décrit ici, d’une manière
prophétique. Cette sorte d’enseignement ne fait pas partie de ceux qu’on peut
lire vite en pensant les avoir assimilés. Extrait de « l’homme
spirituel » de Watchman Nee (Editions Monnier).
Ceux qui font (sans s’en rendre
compte) de leurs sensations le principe de leur vie s’exposent à de nombreux
dangers. Le développement de la sensibilité spirituelle est gêné
par la substitution d’une sensation à l’intuition de l’esprit. L’intuition
ne peut être active que si l’émotivité est tranquille. Ce n’est qu’alors
qu’elle peut communiquer sa pensée au croyant. Et elle se fortifie si elle est
fréquemment utilisée. Mais la volonté de celui qui s’appuie sur ses sentiments
se trouve frustrée dans sa puissance souveraine. Son intuition est étouffée et
ne peut pas s’exprimer distinctement. Comme de ce fait la volonté perd ses
moyens, il faut au croyant d’autant plus de secours de la part de ses
sentiments. Si l’émotivité est en
hausse, la volonté est active, mais si l’émotivité ne fonctionne plus, la
volonté abandonne la partie. Elle ne peut rien faire par elle-même ; elle a
besoin de l’émotivité pour être mise en mouvement. Entre temps
naturellement la vie spirituelle du croyant baisse de plus en plus, en sorte
qu’elle paraît tout à fait éteinte quand les sensations ont cessé.
Cette erreur a pour cause l’influence
trompeuse exercée par les sensations. A ses heures d’extase, l’enfant de Dieu
sent non seulement l’amour du Seigneur, mais il a intensément conscience de son
propre amour pour Lui.
Dès lors, la question qui se pose est
la suivante : ce croyant aime-t-il vraiment le Seigneur quand il Ă©prouve ce
sentiment d’exultation ? Ou bien est-ce ce débordement de joie qu’il aime ?
C’est Dieu, bien sûr, qui donne cette joie ; mais n’est-ce pas aussi Lui qui
l’enlève ? Si notre amour pour Lui est sain, nous devons en manifester la
ferveur dans quelque circonstance qu’il nous place. Si notre amour n’existe que lorsqu’il est assorti
d’une sensation, peut-être qu’alors ce n’est pas Dieu que nous aimons, mais la
sensation.
En outre on peut se méprendre sur la
nature de cette sensation, en la prenant pour Dieu Lui-même, alors qu’il y a
une grande différence entre Dieu et la joie de Dieu. Quand ses sensations se
sont tues, c’est alors seulement que le chrétien se rendra compte – le
Saint-Esprit le lui fera voir – que ce qu’il recherchait si sérieusement, ce
n’était pas Dieu, mais la joie de Dieu. Il n’aimait pas réellement Dieu ; ce
qu’il aimait, c’était la sensation que lui apportait la joie. La manifestation
sensible, c’est vrai, donne le sentiment de l’amour et de la Présence de Dieu,
mais ce n’est pas Lui seul qu’on aime, on L’aime plutôt parce qu’on se sent
rafraîchi, heureux et léger. C’est pour cela qu’on cherche à nouveau la
sensation quand elle s’est retirée. Si on aime vraiment Dieu, on touche du
doigt cette vérité : « Les grandes eaux ne
peuvent éteindre l’amour, et les fleuves ne le submergeraient pas » (Cant. 8/7).
C’est là naturellement une des leçons
les plus difficiles à apprendre. Si c’est selon Sa volonté que nous jouissons
de Sa félicité, ce bienfait nous sera profitable. Mais nous ne ferons pas de grands progrès spirituels si nous trouvons
notre satisfaction dans la joie que Dieu donne, plutôt qu’en Dieu, notre joie.
Car ce serait témoigner plus d’estime au
don qu’au donateur. Ce serait au surplus une preuve que nous continuons Ă
vivre de notre vie psychique et n’avons pas encore saisi ce qu’est une vraie
vie spirituelle. Dieu cherche Ă dĂ©truire toutes les idoles que nous adorons Ă
côté de Lui. Il tient à écarter tout ce qui fait obstacle à notre marche
spirituelle. Il entend nous voir vivre en Lui et non pas dans nos sensations.
Un autre danger peut se présenter pour
ceux qui vivent par leurs sentiments plutôt que par leur esprit – avec le
concours de la volonté. Ils peuvent être
séduits par satan. Il y a là quelque chose qu’il faut absolument
savoir. Satan est habile Ă contrefaire les sensations qui viennent de Dieu.
S’il cherche à créer de la confusion dans la vie de ceux qui marchent vraiment
par l’esprit, à combien plus forte raison cherchera-t-il à jouer des tours à ceux
qui obéissent à leurs sentiments ! En recherchant les
émotions, ils tombent directement sous l’empire de satan, qui
sera ravi de leur procurer des sensations de tous genre, qu’ils prendront
toutes comme venant de Dieu.
Les phénomènes sensoriels que nous
avons décrits font aujourd’hui un mal considérable à la vie spirituelle du
peuple de Dieu. Des chrétiens sans nombre sont tombés dans le fossé qui bordait
leur chemin. Ils ont totalement ignoré que c’est dans leur esprit que le
Saint-Esprit déploie son activité. Ce qui produit une
sensation dans le corps vient du mauvais esprit neuf fois sur dix.
Pourquoi ce piège cause-t-il tant de dommages dans l’Église ? Parce qu’au lieu
de vivre dans l’esprit, on aime vivre dans les sentiments. Il faut rĂ©sister Ă
toutes les sensations corporelles, et n’ajouter foi à aucune impression d’ordre
physique.
La seule direction sûre nous vient de l’intuition, dans les profondeurs de
notre ĂŞtre.
Une observation attentive de la vie
sensitive du chrétien peut mettre à nu son principe sous-jacent. Il n’est autre
que « la satisfaction du moi ». Pourquoi le sentiment de joie est-il si
recherché ? Pour satisfaire le moi.
Pourquoi la stérilité est-elle si abhorrée ? Parce qu’il faut sauver
le moi. Pourquoi recherche-t-on des sensations physiques ? Pour le moi. Pourquoi soupire-t-on
après des manifestations surnaturelles ? Pour la satisfaction du
moi.
Oh ! Que le Saint-Esprit nous ouvre les yeux sur ce qu’il y a de vie propre
(vie naturelle) dans cette vie sensitive prétendue « spirituelle » ! Que le
Seigneur nous montre, quand notre vie déborde de joyeuse émotion, que c’est
encore le moi qui est au centre ! c’est l’amour du
plaisir, pas autre chose ! Le caractère réel ou illusoire de la vie spirituelle
peut être jugé par la manière dont nous traitons le moi …
Source :
http://www.lesarment.com